69e Festival de Cannes : 6e Jour

69e Festival de Cannes : Chris Pine

69e Festival de Cannes : 6e Jour avec Chris Pine (c) Moland Fengkov

Dans le grand marathon des séances, qui s’accélère étrangement dès le lundi, il en est une particulièrement agréable. Celle de la présentation officielle des films sélectionnés dans la section Un Certain Regard. Et en particulier, la séance de 22h, que les journalistes peuvent enchaîner juste après la projection presse à 19h d’un film en compétition officielle. Cette dernière séance, dans la grande salle Debussy du Palais, que beaucoup de badauds confondent pour les fameuses marches officielles (des marches, un tapis rouge, ça peut prêter à confusion pour le festivalier qui foule la Croisette pour sa première fois), s’achèvent souvent bien au-delà, puisque l’équipe du film, présente dans la salle, prend en général son temps pour sortir par lesdites marches, au pied desquelles les attendent les voitures du festival. Cette sortie, bien qu’encadrée par un service d’ordre, reste bon enfant, le public pouvant approcher de près les stars présentes, souvent décontractées, surtout si le film a plu.

Ce fut le cas du film de David MacKenzie, Hell or High Water (Comancheria), avec deux pointures dans à l’affiche : Chris Pine (voir photo) et Ben Foster. Après la courte présentation du film, lorsque l’équipe descend de la scène pour rejoindre sa place, une spectatrice lance un « I love you » tonitruant. A l’adresse de qui ? De Chris Pine (notre photo) ou de Ben Foster ? Qu’importe, le film part en terrain conquis. MacKenzie se définit comme un américain amateur, soit un cinéaste européen qui pose son regard pour la première fois sur les territoires mythiques des Etats-Unis. A l’instar d’Andrea Arnold, une autre Anglaise, elle, en compétition officielle avec American Honey, foulant les routes peuplées de white trash, MacKenzie compose un western moderne, avec deux frères braquant des banques, mais pour sauver la mémoire de leur famille (pour racheter le ranch familial tenu par les banques après la mort de leur mère) et pour assurer un héritage aux fistons de l’un des deux bandits, d’autant qu’on a découvert sur le terrain du pétrole, de quoi assurer une rente de 50 000 dollars par mois. La complicité entre les frangins crève l’écran. Les vannes fusent et font mouche, on est dans l’amour fraternel et viril. Face à eux, un autre duo lancé à leurs trousses : deux rangers (un bon vieux cowboy à l’approche de la retraite et son coéquipier indien) dont la relation se base également sur une amitié émaillée de boutades. « Tu sais, j’ai aussi du sang mexicain ». « Intéressant, mais je n’ai pas encore épuisé mes blagues sur les Indiens. » Loin d’être un polar qui fera date, le film fonctionne pourtant bien, et cette transposition d’un western (braquage de banques, poursuite sur la route, fusillades entre gangsters et habitants tous armés, shérif fatigué mais toujours efficace) dans le Texas moderne des petites villes fantômes se laisse regarder avec plaisir. Drôle sans sombrer dans le potache, touchant, digne.

Alors que Chris Pine s’engouffre dans une voiture aux vitres teintées derrière laquelle se jettent des groopies hystériques, Ben Foster traîne encore en haut des marches, puis fausse compagnie aux attachés de presse pour se diriger, incognito, vers le port, où l’attend une soirée sur un bateau. On le regarde s’éloigner, tel le fantôme d’un longsome cowboy dans le crépuscule du désert. Pour ces petits instants magiques, les séances du soir de la section Un Certain Regard valent parfois la peine qu’on les préfère à une séance officielle en haut des Marches officielles.

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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
Moland Fengkov

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