69e Festival de Cannes : 9e Jour

69e Festival de Cannes : Iggy Pop

69e Festival de Cannes : 9e Jour avec Iggy Pop (c) Moland Fengkov

Il a tenu sa promesse. En conférence de presse, Iggy Pop avait accepté le défi de fouler le tapis rouge torse nu, bien qu’il eut prévu une chemise dans sa valise. C’est donc les épaules recouvertes uniquement de sa veste qu’il se présente au pied des Marches, à la séance de minuit de la présentation de Gimme Danger de Jim Jarmusch, qui réalise une belle performance en alignant un film en compétition (Paterson) et un autre hors compétition. A l’écran, le chanteur raconte l’histoire des Stooges, avec force anecdotes croustillantes et une gouaille réjouissante : « Merci à celui qui a lancé une bouteille sur ma tête. Tu m’as encore raté, mec, reviens la semaine prochaine », lance-t-il au public à la fin d’un des concerts finissant dans un grand n’importe quoi. Les Stooges ont littéralement enterré les années 1960, dans la fureur bien retranscrite par la bande son, dont le volume semble avoir été poussé au maximum dans le Grand Théâtre Lumière. C’est donc dopé qu’on ressort de la projection, vers 2h30 du matin, car ce soir, les Marches sentaient davantage la sueur et la bière que les strass et paillettes. Wock’n’woll ! Lire notre critique de Gimme Danger.

La journée avait commencé sur un autre mode. Cristian Mungiu dévoilait son nouveau chef d’œuvre, Baccalauréat. Soit une plongée dans la corruption ordinaire, à travers le point de vue d’un père de famille désillusionné et revenu des espérances nées de la chute de Ceaucescu. Pour sa génération, la lutte est perdue. L’espoir de voir le pays évoluer s’est tari et repose désormais sur les nouvelles générations. C’est pourquoi il mise sur le succès de sa brillante fille qui, si elle réussit haut la main ses examens, pourra partir étudier en Angleterre. Seulement voilà. Plusieurs événements vont venir bouleverser ces plans. En une série de plans séquences sobres mais sophistiqués, Mungiu suit le parcours du combattant d’un homme qui doit gérer plusieurs problèmes tout en restant fort devant autrui, et au-delà de ces conflits et appels à l’aide auprès de nombreuses connaissances influentes, au-delà d’un portrait pessimiste de la société roumaine, c’est une histoire universelle que le film raconte.

L’autre événement de la journée fut la projection de presse de The Neon demon, de Nicolas Winding Refn. Un réalisateur qu’on attend au tournant, après le succès de Drive et la déception de Only god forgives. On pouvait s’attendre au pire comme au meilleur avec les exubérances stylistiques de son cinéma. Force est de constater que ce film divisera la critique, tout comme celui de Xavier Dolan, tous deux copieusement sifflés à la fin de la projo. Pour autant, ce film d’horreur peut constituer une sorte de plaisir coupable et honteux. Ses couleurs vives, sa mise en scène froide et sa bande son électro hype et sombre, s’accordent parfaitement avec le propos du film, soit une plongée sanglante et cruelle dans le monde cannibale de la mode. Cannibale, au sens propre comme le figuré. Un monde qui fascine tout autant qu’il repousse. Un film à l’image de Cannes, finalement. Où les rapports humains obéissent à des règles propres à ce microcosme, oscillant entre mondanités intéressées et coups de Trafalgar des plus violents et sournois, le but étant de littéralement digérer la concurrence pour que les flashes ne crépitent que pour soi.

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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
Moland Fengkov

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