Paterson

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Paterson est une fable célébrant les petits riens, les petites joies du quotidien, la paix d’un amour équilibré, le tout nimbé de poésie candide. Paterson est chauffeur de bus dans le New Jersey. Il aime son métier, en tout cas il s’y rend sans rechigner. Au volant, il capte des bribes de conversations. Il note le tout sur un carnet. Ces notes alimentent son inspiration, puisqu’il est aussi un poète sensible aux détails de la routine. Ses haïkus semblent naïfs, voire ridicules, mais tout ceci n’est qu’apparence. Car au-delà des rituels qui se répètent chaque jour (promenade du chien, petit verre au bar du coin, métro, boulot, dodo), Jim Jarmusch célèbre une certaine forme de bonheur avec tendresse et subtilité, sans esbroufe mais avec une modestie réjouissante qui confine au sublime.

Le rythme lent du film qui s’étire sur une semaine en égrainant les journées une à une pourrait provoquer l’ennui, mais il n’en est rien. Le tour de force de la mise en scène consiste à instiller du lyrisme à cette routine en s’attardant sur les infimes variations au milieu des répétitions rituelles. Ainsi, la poésie ne se limite pas aux mots que Paterson gratte sur les pages de son carnet. Elle habite le film tout entier. La caméra se promène dans la ville, suit les anonymes croisés chaque jour, prête attention à sa respiration, et pose un regard bienveillant sur le couple que Paterson forme avec son épouse, enthousiaste, qui modifie le décor de leur chez eux avec autant de créativité qu’une artiste plasticienne.

La magie du film de Jarmusch tient dans ces nuances subtiles sans effets de manche, cet optimisme et cette confiance tant en la vie qu’au cinéma avec un refus du spectaculaire qui confine au génie. Car Paterson prouve le bon cinéma ne dépend pas forcément d’un grand sujet, d’un scénario sophistiqué aux ramifications riches, mais qu’il doit sa réussite à une mise en scène intelligente et sensible. On se sent proche de ce couple, loin des êtres extraordinaires des histoires romanesques, car ils ressemblent à ce que tout amour peut espérer : faire de chaque jour un poème.

 

Réalisateur: Jim Jarmusch – Acteurs: Adam Driver, Golshifteh  Farahani – Durée: 1:58 – Année: 2016 – Pays: Etats-Unis

 

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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
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