Quand une britannique comme Andrea Arnold pose son regard sur la jeunesse désenchantée des Etats-Unis, cela donne un road-movie de toute beauté, sauvage, poétique et libre.
Star, une jeune ado, quitte sa famille défavorisée pour suivre une bande de jeunes sillonnant le Midwest à bord d’un van, pour vendre des abonnements de magazines en faisant du porte-à-porte. En apparence, la troupe, menée par une chef tyrannique à peine plus vieille qu’eux, jouit de cette liberté. Lors des trajets, la musique et les drogues saturent l’habitacle de la camionnette, et le soir, une fois entassés dans des motels de seconde zone, ou au clair de lune, ils font la fête jusqu’à plus soif.
Inspiré d’un article paru en 2007 dans le New York Times, le film documente ces autoentrepreneurs dont le rêve américain ne signifie guère grand-chose, ces jeunes un peu en marge de la société de ce qu’est un pays avançant à plusieurs vitesses, ces white trash qui se confrontent, de ville en ville, à une autre Amérique, repliée sur elle-même. La confrontation des deux mondes donne un portrait saisissant des Etats-Unis, certes très orienté par le regard d’une réalisatrice étrangère, mais assez juste dans la représentation d’un visage du pays qu’on n’a pas l’habitude de voir, si ce n’est dans la photographie contemporaine, comme celle de Robert Frank, par exemple. A ce titre, la lumière du film, saturée de couleurs, solaire, évoque précisément cette photographie si typique des grands noms américains. On pense, dans un autre genre, mais dans un style proche, au Spring breakers d’Harmony Korine. Ou comment insuffler de la poésie à une réalité moyennement réjouissante.
American Honey, c’est aussi une histoire d’amour, entre Jake (Shia LaBeouf, impérial et charismatique), le meneur des vendeurs, et la jeune recrue, novice dans la vie malgré sa carapace (Sasha Lane, actrice non professionnelle qui irradie le film, grâce à la direction d’acteurs dont Andrea Arnold a le secret, comme elle l’avait déjà montré pour son précédent film, Fish Tank). Les deux personnages, dans leur ballet amoureux, injectent de l’énergie au récit et à la fiction. Il y a quelque chose du parcours initiatique sur la route d’une certaine liberté.
Réalisateur : Andrea Arnold – Acteurs: Shia LaBeouf, Sasha Lane – Durée: 2:43 – Année: 2016 – Pays: Grande Bretagne
Moland Fengkov
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