Cristian Mungiu fait partie de ces réalisateurs dont chaque œuvre se déploie avec une fluidité d’une grande maîtrise et qui dévoile insidieusement son propos par petites touches envoûtantes. Baccalauréat, son quatrième opus, continue à dresser le portrait déliquescent de la Roumanie post-Ceaucescu par le truchement d’un drame intimiste qui touche à l’universel. Après l’avortement illégal (Quatre mois, 3 semaines et un jour, Palme d’or au Festival de Cannes en 2007) ou les dérives du fanatisme religieux (Au-delà des Collines), ce film explore la question de la corruption ordinaire. Pas celle qui peut sévir dans les hautes sphères de l’Etat ou des institutions, mais celle qu’on n’oserait même pas nommer comme telle, lui préférant les termes de petits échanges de services entre amis. Ou comment, compromission après compromission, le complexe engrenage des servilités se met en route dans la vie de gens ordinaires dont les fins justifient les moyens.
Romeo, un médecin honnête mais médiocre, usé par les années de communisme au pouvoir, veut envoyer sa fille, brillante élève en passe de passer son bac, hors du pays. Agressée dans un chantier, celle-ci se remet difficilement et voit ses chances de bonne note (condition sine qua non pour obtenir une bourse d’études en Angleterre) compromises. Un homme influent lui propose alors un marché : en échange d’un foie neuf, celui peut faire jouer ses relations pour corrompre le correcteurs des copies de l’examen.
Avec méticulosité, Mungiu pose sa caméra et observe alors ses personnages sombrer avec la froideur scientifique que les longs plans séquences offrent. Chaque choix que son Roméo fait l’entraîne davantage dans un cauchemar ordinaire. D’une intelligence rare, mais qu’on retrouve dans tous ses films, le cinéaste roumain utilise une mise en scène sophistiquée mais sans esbroufe pour laisser l’angoisse et le suspense s’installer.
Réalisateur: Cristian Mungiu – Acteurs: Adrian Titieni, Maria Dragus, Lia Bugnar– Durée: 2:08 – Année: 2016 – Pays: Roumanie
Moland Fengkov
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