Lovelace contient tout ce que vous pouvez attendre d’un film à propos d’une actrice porno : On y voit une héroïne naïve, des mecs louches, quelques moments de gloire, des situations sordides et un peu de glamour. Si ces éléments offrent certainement une prémisse solide pour un scenario, ils s’avèrent aussi être un handicap dans cette adaptation autobiographique de la vie de Linda Lovelace, l’héroïne du fameux Deep Throat.
Que vous soyez, ou non, familier avec le documentaire Inside Deep Throat, le best-seller Ordeal (sur lequel ce film est basé) ou le blockbuster pornographique, vous avez probablement déjà une idée de ce qui va arriver, ce Lovelace se déroulant sans grandes surprises – au cas où vous vous poseriez la question, non, je n’ai pas eu la chance d’explorer ces œuvres mais si vous êtes à la recherche d’un prétexte pour approfondir le sujet, ne vous gênez pas !
Les cinéastes Rob Epstein et Jeffrey Friedman ayant probablement réalisé que cette histoire était trop linéaire, ils ont construit leur film autour de flashbacks – à moins qu’ils aient vraiment cru qu’ils allaient nous surprendre, ce qui serait trop naïf ou condescendant. Ils nous montrent d’abord l’histoire de cette Cendrillon du porno, de ses débuts à sa grande heure de gloire, avant de tout rembobiner pour offrir cette fois une version beaucoup plus réaliste et sombre. Malheureusement, pour un film ne durant seulement qu’une heure et 32 minutes, la démarche apparait non seulement maladroite mais aussi comme un moyen paresseux de remplir 90mn de bobine.
Le problème principal de ce film est simplement que ni le scénariste, ni les deux réalisateurs ne sont à la hauteur du sujet. Adaptation édulcorée et formelle, Lovelace a des airs de téléfilms ou pourrait même être vu comme une œuvre pédagogique misant en garde contre les dangers du monde pornographique. Comparez ce film au brillant Boogey Nights de Paul Thomas Anderson et vous verrez immédiatement ce qui manque ici, à savoir de l’autodérision, du style, du rythme et le goût du risque. En parlant de risques, j’ai aussi trouvé ce film très hypocrite, parce que trop prude pour son sujet – non pas que je voulais voir des scènes pornographiques mais pour un film qui traite de ce milieux, il s’avère bien plus puritain que n’importe quelle série de la chaine américaine HBO.
Que gardera-t’on de Lovelace ? Outre l’aspect autobiographique mis en perspective, la performance honnête des acteurs principaux rend ce film regardable. Dans le rôle-titre, Amanda Seyfried montre innocence, vulnérabilité et courage – fait intéressant, elle a été découverte dans la série Big Love aux cotes de Aaron Paul qui a fait son chemin dans Breaking Bad. Mais c’est probablement Peter Sarsgaard qui tire le mieux son épingle du jeu, avec le portrait à la fois répugnant et séduisant du mari de Linda. On remarquera également les parents d’Amanda incarnés par une Sharon Stone méconnaissable, toute en retenue, et le calme Robert Patrick (Terminator 2 – un acteur sous-estimé qui était également dans Big Love ).
L’échec de Lovelace semble montrer une fois de plus l’impossibilité de transposer l’industrie du sexe dans une œuvre aseptisée, un film comme The Notorious Betty Page souffrant des mêmes défauts. Si les cinéastes derrière ces projets sont certainement à mettre en cause, on y préfèrera des films qui osent sortir de leur format conventionnel pour confronter nos instincts dépravés, à l’image des récents Spring Breakers et The Canyons.
Réalisateur : Rob Epstein, Jeffrey Friedman – Acteurs : Amanda Seyfried, Peter Sarsgaard – Durée : 1:32 – Year: 2013 – Pays : USA
Fred Thom
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