Curieux objet que ce Personal shopper. Nourrissant son cinéma en puisant dans les codes des films de genre, Olivier Assayas livre une œuvre protéiforme qui tisse sa toile froide, sophistiquée, par moments bancale, autour de l’objet du désir créateur : l’actrice Kristen Stewart, pour qui il a écrit le scénario rapidement après avoir succombé à son talent dans Sils Maria, où elle crevait l’écran aux côtés de Juliette Binoche. Ici, elle occupe chaque plan, seule, et porte le film sur ses solides épaules, aidée par l’intensité du regard d’Assayas.
En apparence, le film commence donc comme la critique distanciée du monde de la mode (Stewart campe l’assistante d’un mannequin, chargée d’aller chercher ses fringues de couturier et de les déplacer jusque dans son appartement), s’arrête du côté des films de fantôme (l’assistante tente de communiquer avec son frère mort dans une maison hantée) avant de sombrer dans le thriller angoissant (notre jeune héroïne reçoit de mystérieux SMS qui vont l’entraîner dans un jeu de piste funeste) mais tout ceci n’est que prétexte pour glorifier la nouvelle muse du cinéaste.
A la croisée des genres, donc, avec plus ou moins de réussite (la dernière partie du film atteint un paroxysme d’angoisse très convaincant, notamment lors des scènes dans l’hôtel, contrairement aux apparitions ectoplasmiques d’une laideur surannée), le film met en place un dispositif relativement complexe qui s’intéresse aux esprits sous toutes leurs formes, des fantômes de l’inconscient collectif à ceux, plus modernes, qui hantent ces robes vides que trimballe Maureen, notre shopper, esclave moderne et consentante. Jamais explicatif, le film développe également sa propre part d’ombre à l’intérieur même de son récit, dans ses ellipses, ses silences, ou encore dans l’obscurité d’une maison inhabitée. Cette mise en scène glaçante résonne avec le magnétisme de son actrice qui traîne sa solitude et ses propres fantômes avec maestria.
Réalisateur: Olivier Assayas – Acteurs: Kristen Stewart, Lars Eidinger, Sigrid Bouaziz – Durée: 1:50 – Année: 2016 – Pays: France
Moland Fengkov
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