Réalité

Affiche de Réalité

En seulement quatre années, le réalisateur Quentin Dupieux a réussi à s’imposer comme l’un des cinéastes les plus iconoclastes du moment et, avec Réalité, il nous livre son œuvre la plus ambitieuse et la plus étrange – ce qui en dit long.

C’est avec le désormais culte Rubber, un film d’horreur modeste racontant l’escapade meurtrière d’un pneu dans le désert californien, que Dupieux avait conquis les spectateurs – tout au moins dans les salles obscures, puisqu’il a avait déjà acquis un succès international sur la scène électronique sous le pseudo de M. Oizo.

Après quelques autres œuvres excentriques comme Wrong et Wrong Cops, on aurait pu s’attendre à le voir plus ou moins rentrer dans le rang, d’autant plus qu’il vit à deux pas des fameuses collines Hollywoodiennes ; bien au contraire, il n’en n’est rien, puisqu’avec Réalité il continue à cultiver cette absurdité emblématique tout en tentant de s’ouvrir à un public plus large.

Le film est construit autour de trois histoires: la première suit un animateur de télévision qui porte un costume de rat et a des problèmes urticaires (Jon Heder de Napoleon Dynamite). La deuxième tourne autour de Reality (Kyla Kenedy), une jeune fille qui non seulement fait l’objet d’un documentaire, mais est aussi obnubilée par une cassette VHS retrouvée dans les intestins d’un sanglier. Enfin, il y a Jason (Alain Chabat), un cinéaste en herbe essayant de faire un film apocalyptique sur des téléviseurs tueurs (probablement, l’alter ego de Dupieux).

Si, bien sûr, les personnages finissent par se croiser à un moment ou à un autre, ne vous attendez cependant pas à trouver des réponses précises qui éclairciraient certains de ces étranges mystères. Tout au contraire, le scénario devient plus complexe en avançant,  Quentin Dupieux brouillant les frontières entre le rêve – ou plus précisément le cauchemar – et la réalité. Si ce thème s’est quelque peu banalisé depuis qu’Inception l’a rendu populaire, le réalisateur lorgne plus vers l’univers de David Lynch, se référant directement au magistral Mulholland Drive et à l’inégal Inland Empire.

La grande différence avec ces films est cependant qu’il met Réalité au service de son humour  – absurde et noir – qui est omniprésent de bout en bout (le producteur Hollywoodien est probablement le personnage le plus amusant). Regardé à un niveau différent, Réalité peut aussi être considéré comme une satire des mondes du cinéma et de télévision probablement basée sur sa propre expérience. Ce qui rend cette critique plus intéressante est cependant qu’elle cible tout autant les œuvres dites de divertissement qu’artistiques – voir en particulier le tournage du documentaire sur la jeune fille; On remarquera d’ailleurs que Dupieux montre bien son appartenance à cet univers qu’il moque gentiment.

Quant à savoir si tout devient clair à la fin, la réponse est évidemment non. Les films de Quentin Dupieux ne peuvent être analysés de la même manière que vous vous pencheriez sur l’œuvre d’un David Lynch ou d’un Stanley Kubrick. Son univers n’est ni limité par un cadre narratif, ni par une quelconque réflexion logique – on est plutôt en face d’un forme d’art libre imprégnée d’une irrationalité onirique. Tout comme avec Rubber, vous devez accepter son imaginatif surréaliste et vous laisser aller à l’aveuglette pour l’apprécier pleinement.

Réalisateur : Quentin Dupieux – Acteurs : Alain Chabat, Élodie Bouchez – Durée : 1:35 – Année : 2014 – Pays : France

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Fred Thom

Fred Thom

Editeur-en-Chef/Fondateur at La Plume Noire
Fred Thom est le fondateur et editeur-en-chef de Plume Noire. Il est né à Marseille, France et vit maintenant à Los Angeles en Californie.
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