The Lobster

Affiche de The Lobster

Affiche du film The Lobster

Inclassable, drôle, inquiétant, surréaliste. The Lobster de Yorgos Lanthimos fait figure d’ovni dans le paysage cinématographique actuel. Sa mise en scène méticuleuse se déploie avec une maîtrise froide qui surprend, amuse et fait frémir. Les comédiens campent leur personnage respectif sans ciller, cachant leurs émotions pour mieux retranscrire le surréalisme du monde que le film dépeint. Le sous-texte sur une société totalitaire, une véritable charge contre la normalité, n’en ressort que plus nettement.

Le film suit une sorte de stage de réinsertion pour célibataires dans une sorte de grand hôtel. Durant leur séjour, les résidents doivent trouver l’âme sœur en un temps imparti, sous peine de se voir transformer en animal de leur choix. Ils peuvent voir leur séjour prolongé si, au cours de parties de chasse, ils capturent des animaux dans la forêt, qu’on comprend être d’anciens célibataires ayant échoué à se constituer un couple assorti.

A partir de ce système, Lanthimos s’amuse à décrire les règles d’un monde où l’humain, l’individu, disparaît derrière les exigences de la société. Une société qui n’accepte pas l’échec ni la dissidence. A l’écran, cela donne lieu à des scènes dont l’humour glacial comme le cinéma scandinave sait bien le pratiquer (on pense à Chansons du 2e étage de Roy Andersson) habite les corps raides, les dialogues abscons, les situations insolites. A ce titre, Colin Farrell excelle dans la peau de cet homme esseulé subissant les contraintes dictées par la société. Avant d’en découvrir le pendant dissident.

C’est là que le film se perd, hélas. Après avoir exploité brillamment son système durant une première partie bien développée, l’intrigue mène notre anti-héros dans l’envers du décor, dans un univers moins policé, sorte de miroir de celui qu’il vient de quitter. On se retrouve dans la forêt, chez celles et ceux qui rejettent ce monde, qui entendent vivre en liberté. Sauf qu’eux aussi édictent leurs lignes de conduite, tout aussi iniques et totalitaires. Le discours du film s’empêtre alors dans une ritournelle qui enfonce des portes ouvertes. Et joue la carte de la fin ouverte, à défaut de savoir comment s’achever.

Malgré cette seconde partie plus faible, The Lobster laisse néanmoins des images fortes et une impression de malaise amusant qui prête le flan à moult interprétations. Brillant dans sa réalisation, moins dans son écriture, le film vaut pour son audace un tantinet impertinente.

Réalisateur:  Yorgos Lanthimos – Acteurs: Colin Farrell, Rachel Weisz – Durée: 1:58 – Année: 2015 – Pays: Irelande
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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
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