Attendu depuis plus d’un an, The Tree of life de Terrence Malick se dévoilait aujourd’hui au Festival de Cannes dans un Théâtre Lumière plein à craquer (certains journalistes ont du assister à la séance du matin dans une autre salle) lors de la séance du matin. Que les choses soient claires. Malick est un grand cinéaste, un auteur qui livre une oeuvre personnelle, son Odyssée de l’Espace (ou de l’espèce), son Graal mystique. Malick éclaire ses plans comme personne, il y insuffle un rayonnement cosmique, tellurique, voire divin. Il dirige ses acteurs comme pas deux, les sublime, nous les livre en état de grâce. Mais on sort de la projection avec un arrière-goût de raté. Pas indifférent, mais avec un sentiment de colère, de déception profonde et de tristesse. The Tree of life aurait pu être un chef-d’oeuvre. Il s’apparente hélas davantage à une chronique familiale auréolée d’atours clipesques dignes d’un clip publicitaire pour vanter les mérites d’un parfum de luxe. Peut-être qu’avec le temps, comme le bon vin, cet ovni se bonifiera, mais pour l’heure, Malick donne l’impression de s’être retrouvé avec des heures de rushes et de s’être demandé quoi en faire. Le résultat est une des multiples possibilités que sa matière propose, et on se sort de ce trip mystique avec le sentiment qu’il n’a pas opéré les bons choix. Pour autant, le film continue à accompagnerle spectateur, ses images restent imprimées sur la rétine. C’est bon signe, ou c’est grave, docteur ?…
Autre déception, mais beaucoup moins grave. L’Apollonide de Bertrand Bonello nous emmène dans la l’ambiance feutrée et opiacée des derniers soubresauts d’une maison close. Evitant la reconstitution d’époque (nous sommes à l’auve du 20e siècle), la bande son rock et le langage contemporain des filles de joie nous le rappelant, le film joue la modernité. On pense indéniablement aux Fleurs de Shanghai de Hou Hsiao Hsien : la caméra se balade avec élégance sur les peaux, les visages, les corps des filles, et joue la carte du confinement du lieu. Malgré ses qualités esthétiques et l’aisance du casting, le film ne parvient pas à susciter autre chose qu’un ennui profond. Les destins tragiques de certaines des pensionnaires de l’Apollonide laissent de marbre, l’intrigue avance avec peine et la fermeture du lieu se vit comme la délivrance : la fin de la séance. Dommage, on aurait voulu aimer ce film.
Moland Fengkov
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