Timbuktu

timbuktu-posterLe 1e plan de Timbuktu résume assez bien le propos du film. Une antilope galope, poursuivie par un pick-up rempli de djihadistes armés d’AK47. Ils tirent dans sa direction pour la fatiguer mais ne la tuent pas. Cette antilope, c’est le reflet d’une orpheline qui court à perdre haleine dans les dunes de sable, à la fin du film. Là réside tout le propos du film : montrer du doigt le ridicule et l’absurdité de la charia. L’abus du pouvoir que confère la terreur installée dans un  petit village malien. Interdiction de jouer ou de passer de la musique, port de gants obligatoire, même pour les vendeuses de poissons, pratique du football interdit, alors qu’on surprend des djihadistes en pleine conversation sur la Coupe du monde de 1998.

Le film d’Abderrahmane Sissako raconte le quotidien de ces villageois envahis par des extrémistes musulmans et se moque de leurs incohérences, de leur interprétation simpliste des saintes écritures, qui leur permettent par exemple de marier des femmes sans leur consentement. L’imam du village leur oppose pacifiquement une autre lecture du Coran, mais l’obscurantisme reste aveugle et sourd à tout argument.

A l’écart de la ville, un berger vit paisiblement avec sa femme et sa fille, mais lorsqu’il tue un pécheur par accident, à la suite d’un différend, la violence de la loi instaurée par les djihadistes lui tombe dessus. Procès sommaire et expéditif, sentence radicale, exécution froide. Lorsque la mort ne vient pas punir les contrevenants, par lapidation ou par balles, ce sont les coups de fouet qui les châtient.

Sissako multiplient les scènes ordinaires d’un quotidien qui tente de s’accommoder de ces lois iniques. De cette subtile résistance que les villageois opposent surgissent des éclats de poésie, comme cette sublime scène où des jeunes disputent un match de football, sans ballon. Puisque la pratique de ce sport est interdite, ils contournent l’interdit en mimant les gestes et les phases de jeu. La caméra suit un ballon invisible.  Face à la terreur, la beauté du geste se dresse. Brillant.

Réalisateur: Abderrahmane Sissako – Acteurs: Ibrahim Ahmed, toulou Kiki, Abel Jafri – Durée: 1:40– Année: 2014 – Pays: France, Mauritanie

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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
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