Valley of love

valleyValley of love relève un peu de l’exercice de style. 35 ans après Loulou de Maurice Pialat, Guillaume Nicloux décide de réunir à l’écran le couple mythique composé par Isabelle Huppert et Gérard Depardieu. Comme l’exercice de style peut tenir sur un concept, il s’agit ici de leur donner rendez-vous au cœur de la fameuse Vallée de la Mort, dans le désert californien. Un rendez-vous fixé par leur fils, mort. L’occasion de convoquer les fantômes du passé et de voir comment ces deux monstres sacrés du cinéma français vont s’approprier le projet. Le décor, riche en symboles, rappelle immanquablement le chef d’œuvre d’Antonioni, Zabriskie Point, mais on se souvient de l’entreprise ratée d’autres réalisateurs ambitieux venus se frotter aux forces telluriques de ces pierres chauffées à blanc par un soleil de l’enfer, comme Bruno Dumont et son 29 Palms.

A partir de ce rendez-vous intrigant fixé par un mort, Valley of love questionne l’amour, le deuil et les illusions, le long d’un parcours cathartique dont on devine l’issue. L’enjeu ne réside pas dans le fait de savoir si au bout du jeu de piste imaginé par le fantôme du fils, les parents retrouveront l’être disparu, mais plutôt s’ils se retrouveront eux-mêmes. Taillé sur mesure pour deux icônes du cinéma, le film laisse le champ libre à son duo d’acteurs, qui s’en donnent à cœur joie, portant le film sur leurs épaules, occupant l’espace, déployant leur complicité mélancolique dans des dialogues introspectifs auxquels ils prêtent leur immense talent. Si on met de côté l’enjeu scénaristique quelque peu niais, le film vaut bien entendu pour la performance du couple, quasiment dans son propre rôle, naturel au possible, touchant, crédible. Quasi documentaire dans le côté anecdotique de certaines répliques, aussi banales qu’authentiques, le film montre un Depardieu fatigué et sensible, loin des frasques dont se repaissent les médias. Face à lui, la fragilité d’Huppert trouve un équilibre dans la libération de son corps perdu dans l’espace vide du désert.

Si le duo d’acteurs au sommet de leur art parvient à tenir le film à bout de bras, il manque cependant l’émotion qui aurait dû ou pu baigner cette errance réflexive. Le film ne repose finalement que sur la performance d’acteurs, et ne réussit jamais à exploiter le dispositif qu’il s’est fixé. De l’espace saturé de chaleur au minimalisme de la mise en scène, le film reste au stade du concept. Dommage.

Réalisateur: Guillaume Nicloux – Acteurs: Gérard Depardieu, Isabelle Huppert – Durée: 1:33 – Année: 2015 – Pays: France

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Moland Fengkov

Moland Fengkov

Moland est le représentant officiel de Plume Noire au festival de Cannes. Outre sa passion du cinéma, il est photographe professionel et journaliste freelance.
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